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COLETTE et les chats

par Cerise Alexandra

Quel étrange moment, ce confinement surréaliste, où le monde entier connaît l’épreuve du temps, de la peur primordiale, de l’espace limité ! L’humanité dans une stupéfaction, est sidérée et partagée à la fois par l’angoisse, le doute, et l’espoir du jour d’après. Pendant que des âmes nous quittent par milliers, seuls, les chats de la maison montrent leur satisfaction de trouver plus souvent des genoux accueillants. En ce temps de silence, ces félins qui nous ont apprivoisés, nous apportent un condensé du monde et de ses créations. Lots de consolation ? non, cadeaux de la vie.

Colette, la Grande Colette, celle qui a été adulée, qui a connu le succès, déclenché le scandale, et laissé une œuvre considérable, l’avait bien compris quand elle disait que « le temps passé avec un chat n’est jamais perdu ».

Née en 1873 à Saint-Sauveur en Puisaye, Sidonie Gabrielle Collette passe son temps principalement à lire et à jouer avec les animaux, dans sa maison natale.

Eprise de liberté, pleine de vitalité, insoumise, elle se lance très vite dans l’aventure que la vie lui réserve. Aux multiples talents, elle sera mime, comédienne, esthéticienne, actrice, journaliste, Directrice littéraire du journal le matin. Ses succès ne se comptent plus dans les cercles littéraires, et le tout Paris l’acclame.

Mais c’est en femme de lettres qu’elle sera connue et reconnue du monde entier sous le simple prénom de COLETTE, nom patronymique de son père.  Son écriture subtile, profonde, évoque avec sincérité son univers, son vécu, et l’ampleur de son œuvre, la placent sans conteste, parmi les meilleurs écrivains de son siècle. Parmi ses succès, citons Claudine à l’école, Le blé en herbe, Sido. Elle reçoit un triomphe aux USA avec l’adaptation au théâtre de son roman Gigi, ainsi que les plus prestigieuses distinctions : membre de l’Académie Royale de Belgique, élue à l’unanimité à l’Académie Goncourt, dont elle deviendra Présidente, grand officier de la Légion d’Honneur, et reçoit la grande Médaille d’Or avec Plaquette d’honneur d’Arts-Sciences-Lettres. Elle est l’écrivain la plus photographiée du XXème siècle, avec sa forte présence, et sa chevelure dense qui ressemble à une crinière de félin.

Elle n’a pas oublié pour autant son affinité avec les animaux, et particulièrement les chats. On la voit très souvent en compagnie de son chartreux, des chats figurent en couverture de ses romans, l’un d’eux intitulé La Chatte, d’une puissante tension dramatique, a pour personnage principal Saha, une chartreuse.

Tenant en haute considération le diplomate Berthelot, elle s’adressait à lui par la formule « Mon Seigneur le chat ». 

C’est en compagnie de chats qu’elle aussi a connu le confinement au cours d’une longue période de guerre dans son appartement du Palais Royal, immobilisée à cause d’une arthrite de la hanche, dans ce qu’elle appelait « sa solitude en hauteur » où elle a continué à écrire près des fenêtres « véritables portes ouvertes sur le monde ».

Décédée en 1954, elle fut une des premières et rares femmes à recevoir des Obsèques Nationales. Elle repose au cimetière du Père Lachaise. Sa maison de Saint Amand en Puisaye se visite ainsi que le musée Colette, lieux chargés d’émotion, avec tous les souvenirs de sa vie publique, mais aussi d’une vie intérieure intense.

Ses aventures sentimentales furent nombreuses, mais la grande et plus longue histoire d’amour partagée de sa vie fut sans doute avec les félins. Elle considérait « qu’il n’y a pas de chat ordinaire » et que « nos parfaits compagnons n’ont jamais moins de quatre pieds ».

Nota : par respect à sa mémoire, Colette est ici présentée en meilleur écrivain du XXème siècle, et non meilleure écrivaine, car c’est en considération de l’ensemble des femmes et hommes de lettres qu’elle se situe. De plus, elle n’avait pas l’esprit suffragette de l’époque dont elle disait à leur propos, « savez-vous ce qu’elles méritent ? le fouet et le harem…

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 Cette fascination que provoquent les chats, Colette l’a partagée avec nombre d’artistes, de scientifiques, de personnages publics, qui de tous temps, se sont exprimés à leurs sujets, et notamment, les écrivains.

 Paul Léautaud est certes un cas, avec ses 300 chats et 150 chiens qu’il a eu dans sa vie, au point de les promener dans un landau, mais on peut citer aussi :

Alberto Giacometti : « Dans un incendie, entre un Rembrandt et un chat, je sauverais le chat. Jean Cocteau qui a été voisin de Colette : « Petit à petit, les chats deviennent l’âme de la maison ». Léonard de Vinci : « Le plus petit des félins est une œuvre d’art ». Oliver Johnson « C’est un honneur que de peindre des chats ». Charles Darwin « Lorsqu’un chat accorde sa confiance à un homme, c’est sa plus belle offrande ». Eckhart Tolle « J’ai vécu avec plusieurs maîtres zen. Tous des chats ». Frédérique Hébrard « Ce sont des êtres sacrés, inaccessibles. Des dieux ». Aldous Huxley « Si vous voulez écrire, ayez des chats ». Albert Schweitzer « Il y a deux moyens d’oublier les tracas de la vie, la musique et les chats ». La liste pourrait être encore longue de ceux qui vénèrent ces animaux étranges. Pour terminer, retenons ce beau texte de Maurice Carême :

« Le chat ouvrit les yeux, le soleil y entra,

« Le chat ferma les yeux, le soleil y resta,

« Voilà pourquoi le soir, quand le chat se réveille,

« J'aperçois dans le noir deux morceaux de soleil ».

                                                                                                                                          

Cerise Alexandra

22 avril 2020

Richard GAUTIER - "Un temps de chien"

Huile sur bois - 92X73 cm

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